Chirurgie esthétique : "fabriquer sa différence"

Publié le 22-05-2014 18:06:54 Modifié le 22-05-2014 18:06:54 Par tmv

L’artiste française ORLAN est invitée pour une conférence à Tours, le 24 mai prochain. Elle prendra la parole pour s’interroger sur la place du corps dans notre société, à l’occasion du 17e Congrès de chirurgie esthétique de la SOFCEP (Société française des chirurgiens esthétiques).

Pour la venue d’ORLAN à Tours, trois artistes exposeront jusqu’au 31 mai au Vinci : Cécile Bisciglia, Fred Chabot et Fabienne Stadnicka.


Cela fait maintenant des années que vous avez réalisé une série de performances dans un bloc opératoire. Et pourtant, on vous ramène souvent à cela. Pourquoi ?

Je crois que j’ai touché à la grâce : quoi que je fasse, une exposition, une nouvelle œuvre, on me parle toujours de mes actes de chirurgie effectués sur mon propre corps. Des interventions que j’ai filmées, retransmises à l’époque dans le monde entier. Pendant les opérations, j’étais consciente, je parlais, je lisais. J’en suis à la fois fière et en même temps, je trouve ça extrêmement pesant, parfois drolatique. Je tiens à préciser que je n’avais pas besoin de faire de la chirurgie esthétique pour moi-même. Je souhaitais mettre de la figure sur mon visage, me sculpter. Mais aussi questionner nos standards de beauté. Je n’étais pas une simple cliente de la chirurgie esthétique. C’était une mise en scène. J’ai fait de mon corps un objet de débat public.
Les images, que beaucoup d’entre nous ont de la chirurgie esthétique, ce sont celles de la télévision, de personnalités comme Nabilla. Comment analysez-vous ces représentations ?
Vous savez, je ne regarde pas la télé (petits rires) ! Dans mes œuvres, j’essaye de mettre d’autres images du corps dans la balance. Je dis qu’il est possible de fabriquer sa différence. Je suis contre les codes, j’ai besoin de montrer autre chose que des stéréotypes. Dernièrement, j’ai entendu parler de jeunes Japonais qui, en sortant de night-club, se piquaient le visage avec des seringues de sérum physiologique. Pendant 12 ou 24 h, ils arboraient des difformités extrêmement visibles, au-delà de la laideur, pour montrer qu’ils ne rentraient pas dans les normes.
On parle souvent de votre œuvre l’Art de la guerre. Pour vous le corps est politique ?
Pour l’Origine du monde, Gustave Courbet a mutilé le corps de la femme en lui coupant la tête, les jambes, les bras et en ne montrant que son sexe. J’ai reproduit cette peinture et remplacé l’image par celle d’un corps d’homme avec un sexe en érection. C’est une œuvre féministe. En montrant un sexe, je voulais également interroger sur le retour de la censure, de la morale, de la liberté d’expression.
Le féminisme, c’est une idéologie importante dans votre œuvre ?
J’aimerais ne plus l’être, ne plus avoir ce souci. Mais au regard du nombre de femmes qui meurent suite aux violences faites par leurs maris, de celles qui sont violées alors même que je vous parle : mais qu’est-ce qu’on a bien pu faire aux femmes pour leur infliger tout cela ?

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